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Rémy Chayé / 2020

Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary


>> Geneviève Sellier / mercredi 28 octobre 2020

Calimity revue à la mode #MeToo


Malgré les nouvelles restrictions imposées à la fréquentation des salles de cinéma, il faut se précipiter en journée, avec ou sans enfant(s), pour découvrir ce petit bijou.
Ce film d’animation français sur une héroïne du Far West est une belle réussite : Rémy Chayé et son équipe – mixte du point de vue genré, il faut le souligner –, a conçu et réalisé cette histoire imaginaire de l’enfance de celle qui est connue sous le nom de Calamity Jane. Le film reprend la tradition du sous-genre western, le film de convoi, qui a mis en valeur le rôle des femmes dans la « conquête de l’Ouest », comme Convoi de femmes (W. Wellman, 1951).

La version qu’en donne Calamity est typiquement post #MeToo : la fillette qui accompagne son père et ses petits frère et sœur dans un convoi pour l’Ouest (la mère est morte), doit bientôt prendre en charge sa famille après que son père s’est blessé. Elle est confrontée alors aux multiples interdits que cette petite communauté (leurs costumes évoquent les Mormons) impose aux filles. Mais elle choisit de les transgresser pour pouvoir chevaucher, manier le lasso, conduire le chariot familial à la place de son père immobilisé à l’intérieur. Elle est en butte à la fois aux sarcasmes des garçons et aux réprimandes des adultes, hommes et femmes. Parce qu’elle a coupé ses cheveux et adopté le pantalon, elle devient le bouc émissaire de la communauté et, accusée de vol, elle décide de s’enfuir pour retrouver celui qu’elle croit le vrai coupable, un soi-disant éclaireur dans l’armée qui aurait volé les objets précieux du convoi avant de disparaître. Accompagnée d’un chien qui lui sert de guide, elle fait diverses rencontres plus ou moins dangereuses, mais elle parvient à retrouver le faux éclaireur et à récupérer les objets volés. Dans l’intervalle, elle a rencontré une maîtresse femme, propriétaire d’une mine d’or, qui la prend sous son aile jusqu’à ce qu’elle puisse reprendre la route pour retrouver sa famille.

Ce roman d’apprentissage d’une fillette obligée pour survivre de devenir un garçon manqué et qui y prend goût, adopte une esthétique magnifiquement colorée et lumineuse, en larges aplats qui évoquent la beauté des paysages de l’Ouest sous des ciels immenses. De quoi réconcilier avec le cinéma d’animation accessible aux enfants, toutes les personnes (dont je suis) rétives à l’esthétique Disney… On peut seulement regretter que l’Ouest américain soit montré comme une nature vierge d’habitants autochtones, dans un "oubli" problématique du génocide des Indiens…


>> générique


Polémiquons.

  • Une des grandes forces de ce magnifique film d’apprentissage, c’est de ne pas masquer les nombreux échecs de la petite fille. Elle n’est pas exceptionnellement douée, et le film montre l’acharnement et le travail qu’il lui a fallu pour apprendre à se servir d’un lasso, par exemple.

    Et ceci est montré avec une grâce, un sens du timing cinématographique, qui fait que jamais rien n’est lourd, bien au contraire. La scène du lasso doit durer une minute, et on comprend tous les essais ratés, et la rage, et l’échec...
    Et sur le fond, ce film délicieux montre aux petites filles et aux petits garçons que rien n’est une question de talent inné (les hommes ayant bien sûr des talents innés pour lancer le lasso et les femmes pour langer les bébés), mais d’apprentissage, et d’acceptation des échecs.

    Le cinéma d’animation est une mine de films féministes, souvent ignorés des cinéphiles. Je rappellerai simplement "Princesse Mononoké", et "ma vie de courgette".

    Et n’hésitez pas pas à aller voir ce film sans enfant- prétexte, personne ne vous regardera de travers (je pars de l’hypothèse optimiste et raisonnable que les mauvais jours finiront et que les cinémas réouvriront)

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