Claudia Cardinale, la plus française des actrices italiennes, s’en est allée à 87 ans. Alors qu’on aurait pu croire, en regardant ses films, que sa jeunesse et sa beauté étaient éternelles…

Dès ses débuts au cinéma, elle travaille avec les plus grands et incarne des personnages marquants. Dans Le Pigeon de Mario Monicelli en 1958, elle est Carmela, la Sicilienne, qui confinée dans sa cuisine, foulard sur la tête et balai à la main, est déjà d’une grande espièglerie en claquant la porte au nez de Renato Salvatori. Luchino Visconti lui confie un petit rôle dans Rocco et ses frères (1960) mais déjà celui d’une femme qui travaille et n’hésite pas à gifler l’homme qu’elle aime pour qu’il la respecte. Lors d’une scène de bagarre, Visconti, qui l’adorait, prit son porte-voix pour crier : « Ne touchez pas à la Cardinale ! » C’est encore Visconti qui lui offrit le rôle sur mesure d’Angelica, la fille sublime du bourgeois parvenu Don Calogero, dans Le Guépard (1963). Son entrée dans le salon du Prince Lampedusa restera comme l’une de ses plus belles apparitions, sa beauté d’abord perceptible dans les yeux de ceux qui la regardent avant de frapper ceux des spectateurs. Elle aura tourné la même année, en parallèle, Le Guépard et 8 et demi de Federico Fellini, la brune, intrigante et ambitieuse d’un côté, la jeune fille à la fontaine, blonde et angélique de l’autre.
Elle aura traversé tambour battant ces années 1960, passant d’un chef d’œuvre à l’autre, en Italie, en France et aux États-Unis. Elle y sera tour à tour la princesse indienne de La Panthère rose de Blake Edwards (1963) mais aussi, bien sûr et surtout, Jill, l’ancienne prostituée d’Il était une fois dans l’Ouest de Sergio Leone (1968) où elle défendait bec et ongles ses terres en se confrontant à un monde d’hommes.
Claudia Cardinale était une femme et une actrice puissante, qui ne s’est jamais laissée enfermée dans un rôle et une féminité. Muse incontestée des grands réalisateurs italiens des années 1960, elle a su construire, dans une société encore très patriarcale, une carrière riche, incarnant à la fois des personnages de femme angélique mais aussi des femmes libres, complexes, engagées, physiques, qui ne se sont jamais laissé dicter leur conduite ou leur vie, une femme moderne tout simplement.
« Amuse-toi, ça empêche de mourir » disait-elle à Jean-Paul Belmondo dans Cartouche de Philippe de Broca, en 1962. Mais la vie a passé et la ragazza a fini par poser sa valise.





